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Atlantia et Benetton : donc la discontinuité est boiteuse

La démission du PDG d'Atlantia ne suffit pas à marquer une véritable discontinuité entre l'entreprise et les actionnaires : si le conseil d'administration avait voulu séparer leurs responsabilités, il aurait dû révoquer les pouvoirs et le PDG d'office pour juste motif, sans rémunération, et ouvrir une enquête pour évaluer l'action en responsabilité

Atlantia et Benetton : donc la discontinuité est boiteuse

Je précise que j'ai suivi l'affaire de l'autoroute exclusivement de la presse et que je n'ai pas d'autres informations que le communiqué de presse d'Atlantia du 17 septembre 2019, ma réflexion est donc peut-être incomplète mais pourrait servir à orienter les demandes de presse.

Au vu de la gravité des faits et des preuves qui ressortent de l'enquête pénale, on comprend que les associés, l'actionnaire de référence, aient demandé la "discontinuité", ce qu'ils auraient obtenu avec la démission du PDG d'Atlantia. Suite à la demande des actionnaires, le directeur général de la société a démissionné.

Ma l'objectif des associés reste sur le plan purement formel de leurs relations avec l'entreprise; et leur image auprès de l'opinion publique. En revanche, la situation qui s'est établie dans la relation entre le conseil d'administration et le directeur général est différente, point décisif pour déterminer la "discontinuité".

Selon le communiqué, le conseil accepte la démission de l'administrateur : « en définissant une résolution amiable avec le même» (transaction ?). Les parties conviennent de l'opportunité de donner une discontinuité formelle dans la gestion de la société. De plus, le conseil ne sépare pas ses responsabilités de celles du délégataire. En effet selon le communiqué de presse le conseil reconfirme le travail du délégué, dont il est remercié, et rémunéré : « L'accord prévoit le versement d'une somme comme incitation au départ ». Au civil, le conseil atteste qu'il a été en mesure de surveiller la conduite des affaires dont les administrateurs assument la responsabilité.

puis nous n'avons pas de discontinuité au niveau technico-juridique des relations entre le conseil d'administration et le directeur général (également administrateur) ; nous avons la continuité; ce qui finit aussi par édulcorer le détachement formel des membres au niveau substantiel du groupe.

Si le conseil avait l'intention de séparer ses responsabilités, il aurait dû révoquer les mandataires et le directeur lui-même pour juste motif, en lançant une enquête de vérifier si les faits justifiaient l'exercice de l'action en responsabilité, en suspendant éventuellement momentanément tout paiement de la rémunération qui était due en exécution du contrat, dans l'attente des résultats des investigations : la révocation pour juste motif exclut la rémunération. La décision n'aurait pas été exagérée face à la gravité des événements et à la nouveaux éléments qui émergent des enquêtes criminelles

Le conseil semble avoir tenu compte de cette hypothèse ; de la possibilité d'exercer une action en responsabilité, où je lis : en cas « d'actes de malveillance avérés et avérés, actuellement inconnus, mis en place au détriment de la Société ou du Groupe ». Évidemment le niveau pénal est confondu avec le niveau civil. La responsabilité civile est intégrée si la faute est avérée, appréciée sur le paramètre de la diligence, même si ce qui s'est passé n'est pas imputable à l'intention de l'agent : il s'agit d'une faute due à un dysfonctionnement de l'organisation de l'entreprise, insuffisante pour éviter les désastres qui se réalisent . La faute intègre la responsabilité civile et non la responsabilité pénale.

°°°°°L'auteur est avocat et professeur de droit commercial à l'Université Luiss de Rome

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