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Adieu à Luigi Covatta, brillant et patient catholique socialiste

Luigi Covatta, ancien leader des étudiants universitaires catholiques et plus tard directeur du PSI et directeur de Mondo Operaio, a disparu dans la nuit de samedi à dimanche : son réformisme était intelligent, généreux et très attentif aux nouvelles générations

Adieu à Luigi Covatta, brillant et patient catholique socialiste

Dans le film "La guerre est finie" d'Alain Resnais, le scénariste Jorge Semprun fait dire à Diego Mora qu'il entreprend de se rendre clandestinement dans un Madrid sous la botte fasciste pour organiser la grève générale, sachant pertinemment que ce sera un échec et qu'il sera arrêté - que "La patience et l'ironie sont les principales vertus des révolutionnaires". J'y ai immédiatement pensé lorsque la nouvelle m'est parvenue décès du bien-aimé Luigi (Gigi) Covatta. Il nous a quittés la nuit, se réveillant brusquement puis fermant les yeux sereinement comme il avait vécu : comment un Juste, toujours attaché au « bien commun », que le "bon" pour lui et pour ses semblables était et est la politique. Fils du Concile Vatican II, il est devenu, dans cet extraordinaire Milan des années soixante du XXe siècle, un brillant cadre de l'Entente: l'organisation des universitaires catholiques qui alimentait, avec les autres organisations étudiantes universitaires, cette pépinière de la classe politique italienne destinée à diriger les partis de la République après les années de la «automne chaud» et les soi-disant « soixante-huit ». 

Mais Gigi a eu une autre expérience politique formidable quand il faisait partie de ce courageuse patrouille de catholiques dirigée par Livio Labour qui, après la décision de l'ACLI d'abandonner le collatéralisme avec la DC, proclamant le principe de la liberté de vote pour l'ACLI, fonda, en 1970, la  Mouvement politique ouvrier  et le journal "Alternativa". 

Avec Gennaro Acquaviva, auquel il a été lié toute sa vie par un lien profond, Gigi a donné naissance, à partir de là, à l'une des expériences les plus intéressantes non pas de la dissidence catholique, comme on la définit communément, mais de Témoin catholique dans la politique militante, sans rien disperser ni de la foi en Jésus-Christ ni de la foi socialiste. Je pense que ce sont les années où Gigi a appris cette vertu difficile qui n'est pas seulement celle du révolutionnaire mais, plus encore, celle du réformiste : la vertu de patience. C'était de cette patience, encore plus héroïque que celle du réformiste, dont je parlais souvent avec Gigi - moi qui avais partagé "cette" patience avec Diego - et je suis sûr qu'il prenait déjà alors cette force qui laissait admiratif quand rencontrant sa ferme foi de travail : une force qui ne pouvait provenir que de la vertu de Patience. 

Lorsque l'expérience du mouvement politique ouvrier n'a pas réussi à réaliser son potentiel, Gigi, avec Gennaro Acquaviva et d'autres compagnons, a rejoint le Lombard à gauche du PSI et puis c'était avec Bettino Craxi dans l'histoire politique qui a suivi cette transformation du PSI. Gigi a toujours apporté sa soif de connaissance et de liberté tant dans son activité gouvernementale que dans celle d'animateur culturel, faisant confiance aux jeunes et les aidant dans leur lutte et dans leurs choix.

Votre caractère réservé et discret n'a pas caché la profonde empathie avec laquelle vous avez confronté tout le monde. Avec la Fondation pour le socialisme, aux côtés de Giuliano Amato et Gennaro Acquaviva, a identifié cette crête ardue et haute de la lutte politique qui devait désormais se dérouler dans des conditions nouvelles après la destruction commencée dans les années XNUMX à la fois des partis politiques et de la société politique qui avait donné naissance à eux et qu'avec eux il avait construit la nouvelle Italie républicaine après la Résistance et la Constitution. Une Italie fondée sur l'entreprise publique et privée, sur le Parlement, les organisations syndicales et les instances intellectuelles et culturelles que tout ce monde nourrissait et renouvelait. Gigi a été fidèle à cette inspiration originale en engageant la direction de Mondo Operaio: il lui est toujours resté fidèle à travers mille efforts mais continuelles confirmations du bon choix. 

Une voie réformiste (« menchevik » jusqu'au bout et pour cela ingrate et très dure). La revue "Mondo Operaio" est l'une des dernières frontières : peut-être la dernière qui devait et doit être construite et reconstruite chaque jour dans la recherche à la fois sur les transformations capitalistes en cours en Italie et dans le monde, et sur les formes de morale et résistance intellectuelle, dans l'attente qu'elle était nécessaire et qu'il fallait être prêt à l'affronter avant que la nouvelle voie du socialisme ne s'ouvre à ceux qui n'ont pas perdu foi dans le socialisme humanitaire. Ainsi Charles Péguy écrit à ses lecteurs, avec son sarcasme qui conjugue la douleur au bonheur du témoignage, en introduisant le Treizième Cahier de la deuxième série : « C'est peut étre ces situation de désarroi et de dretesse qui nous crée plus impérieusement que jamais , le devoir de ne pas capituler. Il ne faut jamais capituler… ». C'était le 20 juin 1909. Aujourd'hui, nous sommes plongés dans une histoire mondiale on ne peut plus dramatique. C'est pourquoi l'exemple, le Témoignage, de Luigi (Gigi) Covatta ne peut pas nous abandonner. Nous devons renouveler cette patience des réformistes socialistes d'aujourd'hui et qui renouvelle celle d'hier et qui est celle de toujours... 

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