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VERS LES ELECTIONS - Zingales : "La crise structurelle ne peut pas être résolue en sortant de l'euro"

Dans le débat électoral sur la monnaie unique intervient également le professeur Luigi Zingales de l'université de Chicago, qui, bien que n'étant pas partisan de la première heure de l'euro, prend sa défense - « Le coupable, c'est la politique : notre crise est structurelle, vient d'une forte perte de compétitivité qui dure depuis une vingtaine d'années ».

VERS LES ELECTIONS - Zingales : "La crise structurelle ne peut pas être résolue en sortant de l'euro"
La baisse du spread de nos BTP à dix ans par rapport aux Bunds allemands montre que les observateurs internationaux nous regardent avec intérêt depuis un certain temps ; ils comprennent que, quoique difficilement, nous nous sommes engagés sur la voie d'un redressement financier et institutionnel, et ils attendent de vérifier les résultats concrets de la « fureur réformatrice » qui est certainement dans les intentions du gouvernement Renzi dans quelques mois » temps. C'est pourquoi les élections européennes seront également un signal important pour la consolidation de l'opinion des investisseurs envers notre pays. En effet, nous verrons combien les Italiens sont prêts à se battre pour trouver leur place dans le monde ou si au contraire ils se laisseront encore une fois enchanter par les sirènes de la sortie de l'Euro et par l'inflation dans l'illusion, qu'en de cette façon rien ne peut être changé notre structure politique et productive.

Pour mieux comprendre les termes du problème, un livre précieux a été publié il y a quelques jours par un économiste italien qui enseigne à l'université de Chicago, Luigi Zingales qui, n'étant pas un ardent et idéologique partisan de l'euro, examine avec détachement le pour et le contre la monnaie unique de manière populaire et en recourant souvent à des histoires de la vie réelle ou à des exemples populaires, en limitant au minimum les références à la doctrine économique et aux graphiques.

Zingales n'a aucun doute. Après avoir examiné tous les indices de culpabilité et ceux d'innocence qui se développent comme un roman policier qui laisse le lecteur en haleine jusqu'aux toutes dernières pages, Zingales révèle le coupable : notre crise est structurelle, elle vient d'une forte perte de compétitivité qui a a duré une vingtaine d'années et ne peut être résolu par la sortie de l'euro. En effet, notre crise risquerait de s'aggraver dans une perspective de moyen terme, même si, hypothétiquement, nous étions capables d'amortir les coûts immédiats d'un changement de monnaie qui pourrait conduire à un véritable effondrement du système économique. En bref, si la Ligue du Nord Salvini au lieu d'agiter le livre du prof. Bagnai (de l'Université de Pescara) a également pu lire ce livre, peut-être que ses positions seraient un peu plus prudentes.

Mais au-delà des conclusions générales, il y a quelques notations spécifiques dans le livre qui méritent d'être soulignées. Le premier concerne l'avantage que l'Italie a reçu depuis 1998 de la baisse des taux d'intérêt consécutive à son entrée dans l'euro. Selon le Pr Zingales, si nous avions pleinement utilisé les économies d'intérêts pour réduire la dette publique qui en 98 était égale à 114% du PIB, nous serions arrivés au rendez-vous avec la grande crise de 2008 avec une dette égale à 67% du PIB et non 103,3% comme nous l'avions en réalité. Bref, nous aurions pu affronter la crise sans difficulté, comme l'Allemagne. Et au lieu de cela, nous avons gaspillé une partie importante de cet avantage en gaspillage politique et en miettes de salaires et de pensions distribuées à la pelle. Paradoxalement, la décennie de Berlusconi a aussi été rendue possible par le cadeau que nous a fait l'euro. Et maintenant, ils en parlent comme d'une « monnaie étrangère » !

La deuxième démonstration concerne l'évolution de notre productivité et de notre commerce extérieur. Entre 1999 et 2011, alors que le salaire par heure travaillée a augmenté en Italie plus ou moins comme le salaire français (mais le double de celui de l'Allemagne), la productivité a augmenté de 7 % en France, de 11 % en Allemagne, alors qu'elle a chuté de 6 % en Italie. Et c'est le résultat du gaspillage du secteur public et des rigidités syndicales. Mais nos entreprises sont également à la traîne. En fait, nos exportations ont moins bien marché que celles des autres pays non pas à cause de la surévaluation de l'euro (qui, d'ailleurs, n'était pas là les cinq premières années) mais parce que nos entreprises n'ont pas su se moderniser grâce aux nouvelles technologies TIC et ils sont restés dans des secteurs à faible technologie et à faible croissance. Ceci étant, la dévaluation ne nous apporte aucun bénéfice, si ce n'est de très courte durée, comme cela s'est d'ailleurs déjà produit en 1992.

Enfin, une note plus politique. Zingales n'accorde pas beaucoup d'importance à la nécessité de réformer nos institutions qui, au contraire, ont été tellement malmenées ces dernières années qu'elles rendent pratiquement impossible toute décision. Une gouvernance fiable est la prémisse non seulement pour pouvoir mettre en place des politiques capables d'améliorer la compétitivité interne, mais aussi pour pouvoir aller vers l'Europe avec la crédibilité nécessaire pour pouvoir contribuer à la réalisation de ces réformes qui, du côté communautaire également, semblent indispensables . En revanche, c'est une voie obligée si l'on veut éviter que les nombreux jeunes chômeurs ne voient dans le choix de l'inflation prôné par Grillo la seule issue à l'impasse dans laquelle ils se trouvent. 

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