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Prometeia – Les coûts de la normalisation des marchés financiers

L'INTERVENTION DE FABIO INNOCENZI DANS LE RAPPORT DE PRÉVISION PROMETEIA - La normalisation des marchés passe par le changement de confiance des investisseurs, mais surtout par une série d'interventions réglementaires qui neutralisent l'effet procyclique mis en œuvre par les interventions restrictives menées au début de la crise.

Prometeia – Les coûts de la normalisation des marchés financiers

Dans un contexte de politiques monétaires à forte orientation expansionniste (pour favoriser la reprise économique) et de politiques budgétaires restrictives (pour respecter les contraintes communautaires de déficit et d'endettement public), la normalisation des marchés elle nécessite une modification de la confiance des investisseurs et une modification de la possibilité et de la propension des intermédiaires à prendre des risques (notamment dans la transformation des échéances) et des investisseurs institutionnels à allonger leurs horizons d'investissement.

En effet, la crise a conduit – inévitablement – ​​à une série de mesures restrictives sur le comportement des intermédiaires et des investisseurs institutionnels qui les ont contraints à réduire le risque de crédit et le risque de liquidité.

Ce sont des interventions opportunes et correctes pour garantir la stabilité des intermédiaires et créer les conditions de la reconstruction de la "confiance".

Cependant, de telles interventions ne pouvaient manquer d'avoir un effet procyclique sur la crise actuelle.

Le plus connu et le plus évident est le (plus que) doublement de capital primaire requis offrir un certain niveau de financement à l'économie (petites et moyennes entreprises notamment).

Le rapport Prometeia consacre une série d'informations à ce thème.

En prenant 100 le crédit accordé aux petites et moyennes entreprises (ou plutôt leur actif pondéré en fonction des risques) il fallait disposer de 4 fonds propres de base.

Évidemment, comme le souligne clairement le rapport, dans le contexte actuel de manque de confiance et de manque de capitaux, un mélange de ces deux effets se produit.

La deuxième intervention, moins évidente mais tout aussi pertinente, est celle sur asymétries de liquidité.

Dans ce cas également, le rapport Prometeia met en évidence les aspects critiques.

Dans une situation d'assèchement des marchés de gros des financements à moyen terme, les banques ont été contraintes (encore une fois pour préserver leur stabilité) de réduire les décalages entre la durée des financements et celle des prêts.

En conséquence, dans de rares cas, les banques ont réussi à augmenter le financement à long terme, alors que dans la grande majorité, elles ont dû réduire le décaissement des prêts à moyen-long terme, se réorientant vers les prêts à court terme.

Un troisième facteur affecte les investisseurs institutionnels. L'imposition de soi-disant « budgets de risque » (montant de risque tolérable dans les produits gérés pour le compte des clients) a une logique correcte et prudentielle : elle empêche les gestionnaires d'opérer en assumant des risques qui ne sont pas conformes au mandat reçu des souscripteurs.

Cependant, les budgets de risque sont mesurés à l'aide de la volatilité du marché (ou d'une transformation plus ou moins compliquée de celle-ci). Il s'ensuit qu'une augmentation de la volatilité, même en l'absence de toute activité du gestionnaire, conduit à un dépassement du budget de risque et donc à l'obligation de vendre des actions ou des obligations à moyen-long terme pour acheter des actifs à court terme.

En pratique le comportement des investisseurs institutionnels est inversé qu'au lieu "d'acheter lorsque les marchés baissent", ils sont obligés de "vendre lorsque les marchés baissent".

Le quatrième facteur est le  réinterprétation des contraintes Mifid par des intermédiaires dans un contexte de crise. L'évaluation des profils de risque Mifid est malheureusement toujours basée sur la valeur actualisée nette de l'épargnant quel que soit l'horizon d'investissement (en résumé, le BTP qui garantit un coupon fixe est toujours plus risqué qu'un BOT même si l'objectif de l'épargnant est d'avoir des coupons constants ).

Dans le contexte de crise, avec une augmentation évidente des contentieux, les intermédiaires ont une propension naturelle à minimiser le risque de contentieux avec les clients en privilégiant la vente de titres ou d'actifs à court terme sans risque.

Un cinquième et dernier facteur (conséquence directe des précédents) est le déséquilibre temporaire des poids entre organes de direction et organes de contrôle interne dans le gouvernance des intermédiaires financiers.

Après des années de domination absolue des organes de direction et de simples réalisations formelles des organes de contrôle interne, nous sommes passés à une phase d'inertie des premiers et de forte proactivité des seconds

Si la proactivité des organes de contrôle interne est certes un facteur positif pour le développement durable des activités dans un contexte de risque maîtrisé, l'inertie des premiers est une phase à vaincre.

Les intermédiaires ont besoin, à la fois, d'organes de gestion actifs et prêts à évaluer le risque des nouvelles initiatives et d'organes de contrôle interne tout aussi proactifs et vigilants sur le respect des niveaux de risque convenus.

L'absence des premiers retarde la normalisation des marchés financiers et du crédit qui ont besoin d'intermédiaires actifs dans la prise en charge et la gestion des risques relatifs.

Tous ces facteurs ont conduit les intermédiaires financiers et les investisseurs institutionnels à réduire les décaissements de crédit (surtout à moyen-long terme) et à réduire les investissements en actions ou autres formes de capital à risque.
Ce phénomène a accompagné la phase de baisse de confiance des investisseurs et a rendu très difficile l'accès des entreprises au financement à moyen terme ou au marché des capitaux.

la seule politique fortement anticyclique c'était celle des banques centrales qui garantissait aux intermédiaires et aux autorités un flux abondant et continu de liquidités à court terme.

Cependant, le problème est le suivant : si les intermédiaires ne favorisent pas la transformation des échéances et que les investisseurs institutionnels ne se diversifient pas sur le capital à risque, la liquidité abondante atteint l'objectif minimum de garantir le fonds de roulement aux entreprises et de protéger les intermédiaires du défaut de liquidité mais pas le but ultime de financer les investissements et encourager la collecte de capital-risque.

Alors quelles peuvent être les étapes pour accélérer le retour à la normalisation des marchés financiers et du crédit ?

Un premier facteur est il tempo, grâce à la mise en place progressive des nouvelles règles et des nouveaux comportements.

On partira de nouvelles bases avec des comportements physiologiques sur les marchés lorsque les banques auront atteint le niveau requis pour les nouveaux ratios de fonds propres et l'équilibre sur les contraintes plus fortes de transformation des échéances, lorsque les investisseurs finaux auront atteint le nouvel équilibre de « risque budget » sur des niveaux de volatilité structurellement plus élevés, quand les intermédiaires vont « accompagner » les épargnants sur la partie intermédiaire de leur profil de risque en réduisant la part du portefeuille investie en liquidités ou en actifs à très court terme.

Un deuxième facteur est lié à équilibres de gouvernance chez les intermédiaires financiers : le déséquilibre entre la « passivité » des organes de direction et l'« activisme » des organes de contrôle interne ne peut être soutenable à moyen terme.

La tendance à la réduction des risques, dans une entreprise privée, ne peut que laisser place à une phase de gouvernance plus équilibrée qui vise à prendre un risque conscient mais à montant suffisant pour rémunérer le capital.

Si cet équilibre, nécessaire à la rémunération des capitaux, ne pouvait être atteint, le caractère privé des intermédiaires financiers finirait par être remis en cause.

Le troisième facteur ne peut être que le retour de confiance en soi. Il s'agit d'un facteur influencé à la fois par les événements macro (comme la croissance de leur revenu disponible) et par les effets induits par les intermédiaires financiers, ceux décrits ci-dessus), et enfin, toujours, par le facteur temps (l'habitude d'agir dans un contexte à risque plus élevé).

La normalisation du marché du crédit et des marchés des valeurs mobilières pourrait alors être favorisée par interventions réglementaires sur les investisseurs institutionnels et les épargnants.

Pour les investisseurs institutionnels, ils doivent être étudiés contraire aux règles anticycliques à celles en vigueur et décrites ci-dessus (limites de risque basées sur la volatilité des marchés) : les nouvelles règles devraient encourager les achats lorsque la volatilité des marchés augmente (et la tendance baissière) et devraient plutôt pousser les investisseurs institutionnels à vendre lorsque la volatilité diminue (et nous assistons à une hausse s'orienter).

Le rôle de ces investisseurs finaux dans une perspective de long terme devrait en effet être celui d'un stabilisateur anticyclique du marché.

Pour les épargnants, il faudrait séparer les épargnants qui visent à minimiser le risque de fluctuation de la valeur actualisée des titres (investisseurs BOT, c'est-à-dire sensibles au risque de prix et insensibles au risque d'instabilité du rendement de leur épargne) des investisseurs en rente qui ont plutôt pour objectif de minimiser le risque de fluctuation des taux d'intérêt (investisseurs en BTP long terme, c'est-à-dire sensibles au risque de ne pas encaisser des coupons d'un niveau donné et totalement insensibles à la valeur de marché du titre).

En vertu de la législation actuelle, les épargnants "annuités" qui se considèrent comme "absolument averses au risque" ne peuvent pas investir dans des actifs à long terme car ces titres (en raison de la durée) sont classés par les intermédiaires comme des actifs à haut risque.

L'investissement de long terme est donc entravé, au détriment évidemment non seulement des épargnants « rentiers » mais aussi et surtout des émetteurs (principalement des entreprises) qui auraient besoin de financements de long terme.

L'Europe et surtout l'Italie ont besoin d'une normalisation qui permette un retour à une situation physiologique des marchés du crédit et des valeurs mobilières. Le "facteur temps" joue désormais dans le bon sens. Si, alors, il était également possible de travailler sur les autres facteurs décrits « sans frais » (à la fois comportementaux et réglementaires), peut-être que les épargnants et les entreprises pourraient en tirer des avantages significatifs dans un délai raisonnable.

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