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Black Friday pour l'Italie : l'affaire Tremonti fait s'envoler le spread Btp-Bund et assomme la Bourse

par Ernesto Auci - Les rumeurs d'une éventuelle, bien qu'improbable, démission du ministre de l'Economie Giulio Tremonti après la demande d'arrestation du Milanais offrent de nouvelles armes à la spéculation : les valeurs bancaires en bourse s'effondrent et le spread Btp-Bund brûle records sur records - Un changement de politique et la politique économique est urgente

Black Friday pour l'Italie : l'affaire Tremonti fait s'envoler le spread Btp-Bund et assomme la Bourse

L'écart entre les obligations d'État italiennes et les Bunds allemands dépasse 245 points. Les actions des entreprises italiennes, sauf celles très internationalisées, sont vendues à deux mains à commencer par les bancaires qui sont peu exposées aux titres des pays européens les plus à risque. Maintenant, nous allons crier contre les spéculateurs internationaux, contre les agences de notation qui expriment des doutes sur la soutenabilité de la dette italienne. Les voix se poursuivent. Si parla di possibili dimissioni del ministro Tremonti che bene o male appare come un argine rispetto alle fameliche clientele politiche che si annidano all'interno stesso del Governo, anche se la sua manovra è criticata in più punti e da molti nel mondo finanziario non è ritenuta assez.
Au-delà des anathèmes et des polémiques, il faut regarder avec lucidité et réalisme les signaux d'alarme que lancent les marchés. Ce ne sont pas les spéculateurs, qui existent et font leur travail, mais ce sont les épargnants italiens et étrangers qui expriment leur méfiance quant à la manière d'administrer le pays et de vendre nos titres pour atterrir sur des rivages plus sûrs. Surtout, la manœuvre du ministre Tremonti, en plus de présenter de graves défauts de formulation, ne répond pas à une question fondamentale pour renforcer la confiance dans la capacité de l'Italie à rembourser son énorme dette : à savoir, elle ne fait rien pour renforcer le rythme de développement, pour donner une signal clair sur la possibilité d'atteindre une croissance d'au moins 2%, sans laquelle il sera difficile de soutenir la dette italienne. Pour aggraver la situation, il y a ensuite le chaos politique, la confusion existant au sein du Gouvernement (et aussi en partie au sein de l'opposition) où tout le monde est contre tout le monde, mais les oppositions se déroulent selon des lignes confuses, voire carrément contre-productives.
Mais allons-y dans l'ordre. En premier lieu, la manœuvre de Tremonti qui a certes résisté aux pressions de Berlusconi et de nombreux ministres pour élargir les cordons de la bourse, mais qui est globalement erronée car elle ne réduit pas suffisamment les dépenses publiques mais fait porter l'essentiel du poids de l'ajustement sur l'augmentation du charge fiscale. On estime que les 40/2 de la manœuvre de 3 milliards d'euros sur les trois ans sont réalisés par des hausses d'impôts. De plus, les coupes dans les dépenses sont aléatoires et en tout cas calculées sur des hausses tendancielles, elles n'envisagent donc pas des réductions absolues mais, dans la meilleure des hypothèses, une maîtrise du rythme de croissance. Certaines mesures fiscales sont alors contre-productives, comme celle qui augmente le droit de timbre sur les dépôts de titres auprès des banques (ce qui incitera beaucoup à vendre et déplacer leur épargne à l'étranger) ou comme celle sur la dépréciation des concessionnaires qui risque de ralentir les investissements dans les infrastructures qui sont au contraire essentiels à la croissance de la productivité. Bref, une manœuvre qui ne tient pas compte de la nécessité de renforcer la crédibilité du pays dans une situation de fortes turbulences sur les marchés internationaux. Mais la faute n'est pas seulement celle de Tremonti. Le président Berlusconi semble totalement inconscient de la gravité de la situation et de la nécessité d'actions politiques qualifiantes pour réduire les dépenses et relancer la compétitivité du pays par une libéralisation drastique et des mesures de rationalisation bureaucratique. Et à la place le PDL a voté pour la préservation des provinces ! Démontrer précisément que vous ne voulez rien faire de sérieux pour changer la façon dont le pays est géré et le ramener sur le chemin de la croissance.
Deuxièmement, peu croient que la manœuvre qui devrait aboutir à l'équilibre budgétaire en 2014, malgré tous ses défauts, puisse vraiment passer l'examen des Chambres et peut-être s'améliorer. Il est plus probable qu'il sortira édulcoré en termes de ventes et d'efficacité. Et c'est aussi dû à l'opposition qui blaguait sur la « boucherie sociale » et chassait toutes les revendications des Régions et des Communes qui ne voulaient même pas considérer les raisons d'efficacité et la nécessité de rationaliser les dépenses de leur part également.
Maintenant, les nœuds rentrent chez eux pour se percher. Nous devons éviter le risque que la lutte politique faite uniquement de personnalismes reste sourde et aveugle à tous les signaux d'alarme que les marchés envoient. Ce serait vraiment grave s'il fallait attendre l'effondrement de la maison pour arrêter ces cris confus et mielleux. Aussi parce que non seulement une classe politique peu concluante finirait sous les décombres, mais aussi de nombreux Italiens qui ne méritent pas de payer un prix aussi élevé pour l'incapacité de leurs dirigeants. Il est temps pour quelqu'un de la plus haute colline de faire entendre sa voix encore plus fort.

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