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Ségolène Royal : "Les Etats sont à genoux devant les banques : si je vais à l'Elysée, je vais tout renverser"

ENTRETIEN AVEC SEGOLENE ROYAL - La dirigeante socialiste revient sur le terrain dans les primaires du PS et attaque : « Des relations dangereuses entre le pouvoir politique et le pouvoir bancaire. D'abord les États ont aidé les banques, maintenant elles sont à genoux. Il faut garantir une plus grande présence de l'Etat dans les banques et privilégier la participation des citoyens"

Ségolène Royal : "Les Etats sont à genoux devant les banques : si je vais à l'Elysée, je vais tout renverser"

"Voulons-nous écrire oui ou non tous ensemble une nouvelle page de notre histoire vibrante et populaire ?" demande Ségolène Royal au début de son livre-programme, intitulé "Lettre à tous les résignés et indignés qui veulent des solutions". Un véritable programme gouvernemental, qui vient de faire son apparition dans les librairies françaises. Les solutions proposées par Madame Royal tournent toutes autour de l'idée magique de la participation.

Selon elle, il faut raviver le dynamisme et le protagonisme des citoyens pour redresser la barre après cinq ans de sarkozysme. En 2007, Ségolène Royal est la candidate du Parti socialiste (PS) puis (au second tour) de l'ensemble de la gauche dans la contestation présidentielle face au néo-gaulliste Nicolas Sarkozy. Perdu, mais sans défigurer : 47 contre 53 % des voix. Désormais de retour au pouvoir, mais doit surmonter un nouvel obstacle : les primaires socialistes, qui s'organisent pour la première fois. Jusque dans les années 200, le candidat du parti à l'Elysée était choisi par les instances dirigeantes. Des consultations ont ensuite été organisées parmi les quelque XNUMX XNUMX socialistes détenteurs de cartes de membre.

Désormais, il y a des primaires ouvertes à tous ceux qui prétendent « partager les valeurs de la gauche ». Il y a six candidats, dont François Hollande et Ségolène Royal, qui ont donné naissance ensemble à quatre enfants mais qui sont désormais divisés par le "désir d'Elisée". Il y a aussi la secrétaire du parti socialiste Martine Aubry, fille de Jacques Delors, et la nouveauté est représentée par les "jeunes" Manuel Valls et Arnaud Montebourg, qui n'ont pas encore cinquante ans. Personne ne sait combien d'électeurs il y aura à la primaire. Peut-être un million, peut-être beaucoup plus. La gauche a une grande envie de reconquérir l'Elysée, où (sauf dans la période de François Mitterrand, de 1981 à 1995) le drapeau de la droite a toujours flotté dans l'histoire de la Ve République, qui a commencé en 1958.

Ségolène Royal veut à nouveau défier Sarkozy. Je la rencontre au petit-déjeuner dans un restaurant parisien et trouve une femme extrêmement déterminée, comme il y a cinq ans, mais avec un air plus mûr. Ce soir, il devra affronter les cinq autres candidats aux primaires socialistes, dans un direct diffusé sur France 2, une chaîne publique. Royal veut fortement gagner les primaires puis le duel avec l'ancien rival Sarkozy. L'idée de devoir faire obstacle à son ex-mari François Hollande (en fait les deux ne se sont jamais officiellement mariés) ne l'inquiète pas le moins du monde. Ségolène Royal se considère comme la meilleure représentante de la gauche française et chacun de ses souffles n'a qu'un but : l'Elysée. Le pouvoir au nom du changement pour un pays fatigué de Sarkozy.

Ségolène Royal fête ses 58 ans ce 22 septembre. Pour elle, les primaires socialistes, prévues en octobre, sont probablement la dernière chance de gravir le plus haut sommet du pouvoir transalpin.

Vous, Madame Royal, avez l'habitude de pédaler en montée, mais cette fois les sondages sont contre vous quant au résultat des primaires. Elle serait en troisième position, après Hollande et Aubry. Comment ne se décourage-t-il pas ?

Je veux affirmer mes idées et mes propositions, ce que je fais avec la persévérance, la détermination et la ténacité habituelles. Les sondages laissent le temps qu'ils trouvent. Que comptent les sondages dans la perspective de primaires sans précédent dans l'histoire de France et sur lesquelles la moitié des sondés disent pouvoir changer d'avis ? Évidemment très peu. Les propositions comptent et j'entends profiter de toutes les occasions pour les exprimer, à commencer par les débats télévisés avec mes camarades de parti.

Pourtant, à sa place de nombreux autres politiciens auraient-ils déjà hissé le drapeau blanc ?

Je tiendrai jusqu'à la fin de cette compétition électorale et j'espère aussi la prochaine. Celui de l'Elysée.

Quel est son secret ?

Je crois en ce que je dis. Je l'ai toujours fait et c'est pourquoi les Français m'ont fait confiance. J'ai été ministre trois fois et j'ai été élu quatre fois au Parlement. J'ai aussi réussi à obtenir le mandat aux élections de 1993, qui ont été désastreuses pour la gauche. En 2004, j'ai arraché la direction de la région Poitou-Charentes à la droite alors que peu prévoyaient que j'obtiendrais un tel résultat. Ma solidité vient de mes convictions politiques et de ma proposition fondamentale de participation citoyenne à la gestion des affaires publiques.

Qu'est-ce qui vous frappe dans la crise financière qui secoue actuellement l'Europe et une grande partie du monde ?

Les rapports dangereux entre pouvoir politique et pouvoir bancaire. Une sorte de consanguinité malsaine. Dans mon programme, il y a des contrôles rigoureux sur les transactions financières, il y a des formes de taxation à cet égard et il y a la présence importante de l'État dans le capital des groupes bancaires. Il y a trois ans, les Etats avaient aidé les banques, mais aujourd'hui elles sont à leurs pieds. L'Europe n'a pas compris que la crise de 2008 n'était pas un simple contretemps, mais qu'il s'agit plutôt d'une crise du système financier et de la société dans son ensemble.

Si vous étiez au pouvoir, quelles mesures prendriez-vous immédiatement pour restaurer les caisses de l'État ?

Lutte systématique et efficace contre la fraude fiscale. Obligation de rembourser les sommes que les plus riches se sont vus "accorder" grâce aux avantages fiscaux que leur a accordés Nicolas Sarkozy dans le quinquennat qui s'apprête à s'achever. Relance de l'activité économique.

Comment relancer l'économie ?

Mon idée est de faire de la France un pays d'entrepreneurs. A cet effet, je créerais une nouvelle banque publique destinée à soutenir l'activité des petites et très petites entreprises.

Ces derniers temps, on a parlé en France de scandales financiers et de pots-de-vin en espèces arrivant d'Afrique au sommet du pouvoir à Paris. Pensez-vous à cela?

Je pense qu'on a affaire à un règlement de compte sordide entre les différents clans de la droite française, mais je ne veux pas trop m'immiscer dans ce sujet. L'évidence est que la France a besoin de retrouver sa crédibilité internationale et j'entends travailler dans cette perspective.

Il y a des controverses concernant sa proposition de "confiner" militairement les délinquants juvéniles. Qu'est-ce que ça veut dire?
Je dois faire une prémisse : je m'inquiète du fait que les jeunes et très jeunes qui violent la loi soient placés dans des structures punitives qui risquent de les transformer en criminels à part entière. Nous avons donc besoin d'un système précoce de punition et aussi d'éducation. Un système alternatif à la prison. C'est dans cette veine que j'émets l'hypothèse de la classification militaire des adolescents qui violent la loi.

Pourquoi vous, socialistes, avez-vous perdu les élections de 2007 face à Sarkozy ?

Parce que nous étions divisés. Parce que nous n'avons pas bien compris l'importance de préserver la valeur de notre unité après le débat interne pour le choix du candidat à la présidentielle.

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