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Sapelli : « Fiat et Confindustria ? Guido Carli et Intersind étaient meilleurs »

ENTRETIEN AVEC GIULIO SAPELLI – Sans Fiat, que serait la Confindustria ? La dynamique sociale et entrepreneuriale comptera plus que la déchirure - C'était mieux du temps de Guido Carli - Confindustria devra faire du lobbying en Europe plus qu'en Italie - Sans Intersind et Asap, l'organisation des entrepreneurs est aujourd'hui un mélange indistinct entre public et privé

D'un historien de l'économie et d'un intellectuel à contre-courant comme Julius Sapelli ne vous attendez jamais à des remarques anodines. C'est encore comme ça quand FIRSTonline lui demande un commentaire sur le larme de la Fiat (lire les articles liés 1 - 2 - 3 - 4)et sur les effets que le déménagement de Sergio Marchionne aura sur la plus grande organisation entrepreneuriale italienne. Sapelli le prend de loin et repense le passé, ramenant Guido Carli – le président carli de Confindustria recherché par Gianni Agnelli comme pape étranger – et Intersind et Asap (les organisations d'entreprises publiques qui ont été dissoutes et qui ont ensuite amené des groupes publics à rejoindre Confindustria) comme référence. Le résultat est visible. Voici l'entretien

PREMIÈRE LIGNE – La sortie de Fiat de la Confindustria semble destinée à révolutionner ou déformer la grande organisation des entrepreneurs italiens : que va-t-il se passer maintenant ? Une organisation commerciale peut-elle renoncer à l'industrie privée italienne la plus importante et la plus représentative sans perdre sa mission ?

SAVOIR – La mission de Confindustria se redéfinit par sa propre force du fait de l'évolution de sa base d'adhérents et du fait du fossé qui va s'ouvrir dans le corps social entre les entreprises publiques, fût-elles cotées (et ce n'est pas peu de chose) et les entreprises à gestion nationale d'une part et les petites et moyennes entreprises privées d'autre part. Par ailleurs, l'européanisation est à l'œuvre : la Confindustria doit et devra de plus en plus faire du lobbying en Europe plutôt qu'en Italie. Beaucoup de ses fédérations professionnelles s'acquittent déjà bien de cette tâche alors que Viale dell'Astronomia n'a pas encore saisi le changement nécessaire. Si Fiat abandonnait vraiment Confindustria, comme elle l'a annoncé, peu de choses changeraient à mon avis, également parce que Fiat a toujours été une entreprise privée qui distribue des aides publiques, comme en témoigne le ministérialisme désastreux de Fiat qui a connu son apogée dans la tragédie entièrement agnellienne du unification du point unique de contingence dont nous subissons encore aujourd'hui les conséquences néfastes

PREMIÈRE LIGNE – L'absence de Fiat est destinée à accroître le poids dans la Confindustria des groupes publics dont les dirigeants sont nommés politiquement : la Confindustria deviendra-t-elle de plus en plus gouvernementale ?

SAVOIR – Confindustria est gouvernemental par essence comme tous les lobbies industriels dans le monde, qui ne le sont pas seulement en temps de crise, comme on le voit en France avec le MEDEF. Ce n'est que dans les régimes juridiques de common law que les associations professionnelles sont nombreuses et complètement autonomes du politique, qui réglementent en effet quand elles ne contrôlent pas et souvent avec des avantages pour le bien public, contrairement à ce que l'on croit trivialement.
Au final je pense que ce qui compte c'est l'étoffe du peuple : personne n'était plus "public" que Carli mais il était le meilleur président de la Confindustria car c'était un vrai fonctionnaire. Il faut plutôt évaluer à quel point l'élimination d'Intersind et d'Asap a été désastreuse : maintenant tout est une bouillie indistincte dans laquelle les rôles se confondent au détriment de la transparence

PREMIÈRE LIGNE – Comment la sortie de Fiat affectera-t-elle la prochaine campagne électorale de la Confindustria pour la succession d'Emma Marcegaglia à la présidence ? Quel degré de consensus peut un candidat présidentiel qui propose explicitement d'éviter de nouveaux divorces et de récupérer la première industrie italienne susceptible de rassembler les entrepreneurs ?

SAVOIR – C'est une question à laquelle je ne peux pas répondre. Aucun des candidats présumés n'a encore présenté de programme, de projet. Le temps nous le dira.

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