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Autonomie régionale différenciée : un risque pour l'Italie

L'autonomie régionale différenciée risque de désintégrer le pays et de mettre définitivement au placard la question du Sud - Cela ne signifie cependant pas choisir le statu quo mais, au contraire, il faut relancer le régionalisme démocratique sur de nouvelles bases - Les trois problèmes à traiter

Autonomie régionale différenciée : un risque pour l'Italie

Ces derniers mois, on a pris conscience que autonomie régionale différenciée représentent un enjeu qui décidera de l'avenir du pays. Face à l'opacité avec laquelle sont menées les négociations entre le gouvernement et les différentes régions concernées, cela est dû aux nombreuses interventions de constitutionnalistes, d'économistes, de sociologues, de syndicalistes, ainsi qu'aux intéressantes analyses et rencontres approfondies organisées dans divers lieux. Dans la phase initiale de réflexion, une importante fonction de relance du débat doit être reconnue à l'essai de Gianfranco Viesti : Vers la sécession des riches. Autonomies régionales et unité nationale (la troisième éd.). Un volume - disponible gratuitement en ligne - qui démontre comment l'autonomie différenciée ne doit pas être considérée comme un simple problème administratif ou un énième contentieux qui caractérise l'avancée du gouvernement actuel, mais plutôt, un processus qui comporterait le risque de désintégration du tissu unitaire du pays e l'abandon définitif de la question méridionale comme un problème national.

La semaine dernière, d'ailleurs, la réflexion s'est enrichie avec la publication duappel au chef de l'Etat signé par trente constitutionnalistes, où l'inquiétude quant au risque de marginalisation du rôle du Parlement dans la fonction de protection des intérêts nationaux et de garant de l'unité du pays dans un contexte de développement équilibré et solidaire du régionalisme. D'autres formes d'autonomie - soutient-on - ne peuvent concerner la simple volonté exprimée dans un accord entre le gouvernement et la région concernée, ayant des conséquences au niveau de la forme de l'État et de la structure globale du régionalisme italien.

Dans la situation actuelle, cependant, il est possible que nous nous trouvions bientôt confrontés à d'autres moments où la solution à des problèmes cruciaux pour le pays se résume à des accords de négociation confus entre les forces politiques du gouvernement. Cela ne peut être évité qu'en s'assurant un processus décisionnel transparent, activant une action engageant l'intérêt général et initiant une confrontation institutionnelle et politique réelle et participative.

Sans entrer dans le fond des profils constitutionnel et financier, on peut essayer d'aligner trois types de problèmes à traiter.

Il y a d'abord le problème qui concerne la relation délicate entre autonomie, protection des intérêts nationaux et garantie des fondements démocratiques de l'égalité des droits: le nœud essentiel du respect des fonctions du Parlement relatives à l'exercice des pouvoirs de direction et d'examen (avec possibilité d'amendements) des propositions régionales. Comment et quand le Parlement sera-t-il impliqué ? C'est un thème qui mérite toute l'attention des forces politiques, aussi pour favoriser une relance systémique du régionalisme en Italie. De nombreux éléments objectifs pousseraient dans ce sens : l'impact différencié de la crise économique sur les territoires ; les répercussions de la nouvelle vague de progrès technologique sur les structures de l'économie et de la société ; les questions de durabilité et la nouvelle valeur des variables environnementales ; la nécessité de redistribuer les revenus face aux disparités sociales et territoriales croissantes.

Un deuxième nœud de problèmes concerne le thème de couverture financière correspondant aux demandes d'autonomie en question. Ici, on ne sait pas si la couverture, comme disent les intéressés, a un solde nul, si elle sera imputée sur l'impôt général, si elle sera payée par les régions les plus pauvres. Entre-temps, l'inconstitutionnalité de la pratique de la fiscalité résiduelle semble avoir été reconnue, qui lie l'exercice de l'autonomie au montant des recettes fiscales du territoire et rend la fourniture de divers services, y compris essentiels comme l'éducation et la santé, dépendent de la concentration des richesses individuelles créées sur le territoire lui-même. Mais cela ne suffit pas. On ne peut ignorer que pour quantifier correctement les ressources, il est nécessaire d'activer la prédétermination prescrite des exigences standard et du niveau de performance essentiel (LEP) ; malheureusement des étapes qui n'ont pas encore été abordées dans les cadres institutionnels concernés et qui ne nécessitent pas de délais courts. Comment procéder, alors ? Comment éviter le risque de réduire le pouvoir fédérateur de l'Etat, d'accentuer les différences de citoyenneté, de modifier l'équilibre des finances publiques, de créer des difficultés dans la formation du budget de l'Etat dans sa dimension et dans ses composantes ?

Un troisième ordre de problèmes est lié à la ce qui signifie que l'autonomie régionale supposerait le type et le nombre de compétences requises. Pour ne donner qu'un exemple incomplet : la Région Vénétie "... veut légiférer en matière de protection de l'environnement, de protection et de valorisation du patrimoine culturel, de gouvernance territoriale, de recherche scientifique et technologique et de soutien à l'innovation, de placement et de services pour l'emploi , sur les relations internationales et avec l'Union européenne (…) revendique le transfert à l'État régional des routes nationales et de leur planification, exécution et entretien, (…) les fonctions d'autorisation relatives à la construction et à l'exploitation des centrales de production d'électricité, des lignes électriques , les gazoducs et les oléoducs… » (Viesti, p. 43). Il est clair qu'on ne parle pas ici d'autonomie, mais d'autonomie totale. L'unité de mise en place et de gestion de la politique économique nationale et de gouvernance du marché du travail est rompue, la planification des investissements dans le temps et l'exécution est compromise, le besoin d'interdépendance territoriale et sectorielle est perdu. Dans l'illusion de pouvoir s'insérer, non en tant que système articulé, dans l'économie mondiale contemporaine bâtie sur des chaînes de valeur mondiales.

La conception qui sous-tend l'autonomie régionale différenciée ce n'est pas une perspective acceptable. Mais on ne peut y contrer en réclamant le maintien du statu quo, contestable à bien des égards. Au lieu de cela, vous devez travailler pour un relance d'un régionalisme efficace et démocratique, et de ne pas laisser aux jeunes un avenir fondé sur une culture de division.

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