Partagez

Article 18, en cas de licenciement en Allemagne, l'indemnité l'emporte sur la réintégration

Le débat houleux sur l'article 18 du statut des travailleurs fait souvent référence au modèle de travail allemand - En Allemagne, la cogestion syndicale freine les licenciements mais, lorsqu'ils deviennent inévitables, la réinsertion intervient très rarement - Dans 97 % des cas, les licenciements prennent fin avec le paiement d'une compensation monétaire.

Article 18, en cas de licenciement en Allemagne, l'indemnité l'emporte sur la réintégration

Le débat sur l'abolition ou non de l'article 18 du statut des travailleurs divise la classe politique. Les partisans de l'abolition estiment qu'une plus grande flexibilité du marché du travail aurait un effet positif sur l'emploi. Ceux qui s'y opposent estiment en revanche que l'effet serait négligeable et tendent, à l'appui de cette thèse, à prendre l'exemple de l'Allemagne, pays où licencier n'est pas facile et, malgré cela, le chômage est au plus bas ( à 5 pour cent) et même en baisse pendant les années de crise. En effet, selon l'indice OCDE EPRC (Employment Protection of Permanent workers against individual and collective dismissing), qui mesure le degré de protection des salariés contre les licenciements collectifs et individuels (le score varie de 0, flexibilité maximale, à 6, rigidité maximale ), l'Allemagne est en tête du classement des pays industrialisés, avec un indice de 2,98, contre les 2,29 de la moyenne de l'OCDE (l'Italie est à 2,79).

Cependant, des interprétations hâtives de la signification des données allemandes peuvent conduire à des conclusions erronées. En effet, dans le cas de l'Allemagne, l'indice reflète la nature spécifique de son système de relations industrielles, caractérisé par la présence généralisée de ce que l'on appelle la "cogestion". Il n'est donc pas possible d'« interpréter » l'indice allemand sans tenir compte du rôle de la cogestion, notamment en ce qui concerne la question des licenciements et de la réinsertion éventuelle dans l'entreprise. En résumé, ce sont les raisons. 

La cogestion en Allemagne est régie par le Mitbestimmungsgestz, qui prévoit pour les entreprises de plus de 5 salariés la possibilité de constituer un comité d'entreprise (Betreibsrat), où siègent les représentants des travailleurs, tant ceux inscrits au syndicat que ceux non inscrits. ; pour les entreprises de plus de 500 salariés, les représentants des salariés peuvent également participer au Conseil de Surveillance - avec les actionnaires -, à hauteur d'un tiers, une part pouvant atteindre la moitié des représentants en cas de dépassement des salariés deux mille unités.

Le comité d'entreprise exerce une fonction fondamentale au moment du licenciement. L'employeur a, en effet, l'obligation (sous peine de nullité du licenciement) d'informer les représentants des travailleurs et de leur expliquer les motifs de sa décision. Le travail du conseil est de déterminer si le licenciement est « socialement justifiable ». Selon l'article 1 de la Kundigungsschutzgesetz, c'est-à-dire de la loi régissant les relations de travail dans les entreprises de plus de dix salariés, le licenciement n'est valable que s'il est fondé sur des motifs "socialement justifiés" qui peuvent dépendre du travailleur (par exemple une infirmité permanente), de son comportement (en cas de retards ou absences répétées) ou de l'activité de l'entreprise (en cas de restructuration).

Grâce à la médiation menée par le comité d'entreprise, un accord par le versement d'indemnités est trouvé dans 90 % des cas (c'est le pourcentage le plus élevé parmi les pays industrialisés). Dans les 10 % restants (c'est-à-dire en présence d'une opposition du conseil d'usine ou de l'ouvrier lui-même), ils passent devant un juge. Mais même dans ce cas, presque tous les cas se terminent par un règlement. Si, en revanche, la tentative de conciliation échoue, l'audience est fixée dans un délai maximum de trois mois. Le juge peut choisir entre l'indemnisation et la réintégration, même si, en fait, la réintégration intervient très rarement. En effet, ce n'est que dans 16% des cas que le juge opte pour une protection réelle, c'est-à-dire en cas de discrimination grave.

Alors comment concilier ce faible taux de réinsertion avec le fait que l'indice allemand sur le degré de rigidité de la protection de l'emploi est le plus élevé des pays de l'OCDE ? La raison est simple. Dans le calcul de l'indice, l'OCDE attribue un poids élevé (en termes de plus grande rigidité) à deux aspects du système allemand. La première, déjà évoquée, est celle relative à l'obligation de l'employeur d'informer le comité d'entreprise de sa décision de licencier un salarié. Selon l'OCDE, toute opposition du Conseil à cette décision pourrait allonger les délais de licenciement et donc représenter une rigidité (notamment en termes de temps pour les entreprises qui doivent s'adapter rapidement à des évolutions défavorables du cycle) que d'autres pays ont pas. La seconde concerne l'obligation pour l'entrepreneur (article 1 de la Kundigungsschutzgesetz), en cas de licenciements liés à l'activité de l'entreprise, de faire un "choix social", c'est-à-dire de choisir de licencier des travailleurs socialement moins fragilisés (par exemple, ceux qui ont des familles à charge sont moins susceptibles d'être licenciés). Ces "obligations", en même temps, n'existent que dans la législation allemande, et contribuent donc à une augmentation de la valeur de l'indice. Cependant, l'OCDE elle-même reconnaît que ce système particulier de relations industrielles, basé sur la cogestion, a un rôle fondamental dans la promotion de la conciliation entre les parties.

Ainsi, ceux qui se réfèrent à l'exemple allemand pour démontrer qu'il y a en Allemagne une plus grande rigidité en matière de protection de l'emploi qu'en Italie, sous-estiment la force de son système de relations industrielles. Le fait que les licenciements, dans 97 % des cas, se terminent par le versement d'une indemnité pécuniaire, le démontre.

Passez en revue