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Amortisseurs sociaux et anti-délocalisations : voici comment l'Italie déraille

La réforme des filets sociaux et l'intervention contre les délocalisations imaginées par le ministre du Travail Orlando partent du mauvais pied - La première ressemble à l'extension déguisée du blocus des licenciements et d'une gigantesque machine à subventions publiques - La seconde risque de décourager même plus les entreprises étrangères à investir dans notre pays – Espérons que Draghi ajuste le coup

Amortisseurs sociaux et anti-délocalisations : voici comment l'Italie déraille

Si la variante Delta ne dégénère pas, si un modus vivendi est trouvé dans l'organisation du retour au travail en toute sécurité (la polémique sur le laissez-passer vert est absurde) à l'automne il serait possible de consolider une tendance à la reprise qui s'annonce plus prometteuse que celle des autres partenaires européens. Cependant, il existe des signes peu encourageants concernant certaines initiatives gouvernementales qui ne comprennent pas les besoins d'accompagnement du développement. C'est ce qui ressort en premier lieu des grandes lignes de la réforme des filets sociaux présentées par la ministre Andrea Orlando le 9 août dernier.

Comme l'a écrit Alessandro Barbano sur le Huffington Post commentant les propositions contenues dans les 6 pages du document, plutôt que ''d'absorber les effets de la crise déclenchée par la pandémie et d'accompagner la transition productive qui nous attend, en facilitant la reconversion et la réinsertion des travailleurs expulsés'', la direction prise est cependant tout autre : « mettre en place une nouvelle gigantesque machine de subventions publiques, qui cristallise la crise et la charge sur les épaules du budget de l'Etat, c'est-à-dire sur la dette que les enfants et petits-enfants payer. Le retour de la politique est une fois de plus le conservation du consentement, au prix de huit à neuf milliards d'euros par an. Ce serait le revenu citoyen bis, un puissant levier des droits sociaux, cette fois aux mains du Parti démocrate, capable de regagner la confiance perdue des classes populaires et de renforcer le collatéralisme syndical".

L'approche fondamentale de la réforme d'Orlando, en effet, est la poursuite ''par d'autres moyens'' du gel des licenciements et sa tâche semble être celle de garantir le plus longtemps possible la main-d'œuvre licenciée liée à l'entreprise à laquelle elle appartient, même s'il n'a pas de perspectives, plutôt que d'activer les outils et les ressources pour relocaliser ceux qui ont déjà perdu cet emploi, parce que la crise, les processus de restructuration et de reconversion, les sauts technologiques l'ont voulu ainsi. Le point crucial réside dans les modifications proposées pour les licenciements dont les interventions sont dilatées dans une logique conservatrice dans leurs finalités particulières. Pour signaler ce débordement ce sont les deux nouveaux motifs : proposition de cessation d'activité et liquidation judiciaire. Le traitement des licenciements extraordinaires peut également être demandé pour les processus de transition (cessation d'activité prospective) par les PME de moins de 15 salariés.

La ligne est celle de Maurizio Landini : ''Les amortisseurs doivent être la voie à choisir avant d'ouvrir des procédures de réduction de personnel''. Il ne s'agirait plus d'utiliser ça instruments de soutien du revenu en vue d'une reprise, dans des délais plus ou moins longs par rapport aux processus de réorganisation et de reconversion à affronter. Les filets sociaux doivent également être utilisés pour prolonger l'agonie d'un site de production, juste pour maintenir la continuité juridique des relations de travail qui sont en fait déjà terminées. En y réfléchissant, c'est la ligne que les syndicats poursuivent dans ce groupe d'entreprises qui sont devenues, même au niveau médiatique, le signe de ce qui s'est passé et peut encore se produire après le déblocage des licenciements. Pour le dire franchement, nous pensons à une réforme des filets sociaux visant à résoudre les problèmes des salariés des entreprises (principalement des multinationales) qui veulent fermer, pas de ceux qui cherchent de la main-d'œuvre à embaucher pour continuer à travailler.

Que telle soit la stratégie de certains secteurs du gouvernement peut également être compris à partir d'un examen du projet décret contre les délocalisations. Sur la base de l'identification des entreprises auxquelles s'appliqueraient les nouvelles dispositions, il semblerait qu'un décret ad hoc (seule l'indication des sociétés manquerait, sinon on pourrait l'appeler le décret Whirlpool). Il s'agirait d'entreprises qui au 1er janvier de l'année en cours emploient au moins 250 salariés en CDI et qui entendent procéder à la fermeture d'un site de production situé sur le territoire national avec cessation définitive de l'activité pour des motifs indéterminés d'origine patrimoniale ou déséquilibre économique et financier qui rend probable une crise ou une insolvabilité. Ces entreprises seraient tenues de donner un préavis indiquant les raisons économiques, financières, techniques ou organisationnelles du projet de fermeture, le nombre et les profils professionnels du personnel employé et le délai dans lequel la fermeture est envisagée.

L'exécution ultérieure consiste en la présentation d'un plan avec les actions prévues a) pour la sauvegarde des niveaux d'emploi et des interventions pour la gestion non traumatisante d'éventuels licenciements, tels que la relocalisation dans une autre entreprise, des mesures de politique active de l'emploi, telles que des services d'orientation, d'assistance pour la relocalisation, la formation et la reconversion professionnelle, en vue d'un réemploi ou d'une activité indépendante ; b) les perspectives de vente de l'entreprise ou des ensembles d'entreprises dans le but de poursuivre l'activité, également au moyen de la vente de l'entreprise, ou de ses succursales, à des travailleurs ou à des coopératives constituées par eux ; c) tout projet de reconversion du site de production, également à des fins socioculturelles en faveur du territoire concerné ; d) les délais, phases et modalités de mise en œuvre des actions envisagées.

Poursuivant, une sibylline ''structure pour la crise de l'entreprise'' entrerait en scène, qui conclurait l'examen du plan dans les trente jours suivant sa présentation. La même structure, après avoir entendu les organisations syndicales et l'Anpal, approuverait le plan si l'examen global des actions qu'il contient s'avérait être des garanties suffisantes pour la sauvegarde des niveaux d'emploi ou le transfert rapide des recueils d'entreprises. Avec l'approbation du plan, la société s'engage à réaliser les actions qui y sont contenues dans les délais et selon les modalités programmées et à faire les communications envisagées.

La procédure de licenciement collectif n'a pas pu être lancée avant la conclusion de l'examen du plan. Il y aurait de lourdes sanctions financières si l'entreprise ne soumettait pas le plan ou procédait à la fermeture malgré son manque d'approbation. Heureusement, c'est un brouillon qui, nous l'espérons, ''s'enfuira du sen''. Car on ne peut pas croire qu'un tel décret ait pu être conçu par un esprit clair. Quelqu'un sait bien qu'avec ces règles, une entreprise étrangère souhaitant investir en Italie se poserait la question suivante : mais dans un pays où la justice civile ne fonctionne pas, est-il jamais possible que le seul procès que j'aurais à subir soit concernent mes choix productifs? Dans le mouvement ouvrier, on a beaucoup parlé au siècle dernier du « socialisme dans un seul pays ». Aujourd'hui, nous sommes arrivés au socialisme dans une seule entreprise.

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