Partagez

Roumanie, la crise européenne touche aussi l'Est mais la partie européenne fait la différence

La crise de la zone euro risque de masquer les progrès réalisés ces dernières années par Bucarest – Un fort ralentissement du PIB est attendu pour 2012 et les mesures d'austérité adoptées par le gouvernement risquent de ralentir la reprise – Le secteur bancaire est également dans la balance, avec 16% des actifs aux mains des épargnants grecs – Nouvelles élections en novembre

Roumanie, la crise européenne touche aussi l'Est mais la partie européenne fait la différence

Les détracteurs "à sens unique" de l'Union européenne trouveraient probablement instructif de faire une comparaison entre la Roumanie et la Moldavie, un État voisin et "jumeau" en termes culturels et linguistiques : cette dernière ne fait pas partie de l'UE et reste la pays le plus arriéré de tout le continent, dont une grande partie (la région de la Transnistrie) constitue d'ailleurs un « État dans l'État » et est contrôlée par une oligarchie criminelle. Le premier, en revanche, est membre de l'Union depuis 2007 et a depuis lors obtenu de nombreux avantages, s'engageant sur une voie intéressante vers le développement économique et politique dans le sens de la consolidation des institutions démocratiques. Ce n'est donc pas une coïncidence si en Roumanie, comme le révèlent de récents sondages rapportés par « The Economist », les représentants des institutions de l'UE sont plus estimés que les politiciens locaux.

La comparaison est peut-être trop brutale, mais elle traduit effectivement l'idée de la manière dont l'UE a atteint au moins certains de ses objectifs, à savoir celui de favoriser le développement des pays d'Europe de l'Est issus de l'expérience ratée du socialisme soviétique. La Roumanie est encore loin d'avoir résolu tous ses problèmes, mais elle a considérablement amélioré sa situation ayant bénéficié d'une large part des fonds de développement communautaire et de cohésion régionale et réussissant à devenir une destination privilégiée pour les investissements en provenance de l'Ouest. Toutefois, quant aux autres pays encore structurellement faibles car dépendants de l'afflux de capitaux étrangers, Bucarest souffre plus que d'autres de la conjoncture économique "difficile" (pour le moins) en passant par le zone euro.

Après deux ans de récession, en 2011, la croissance du PIB s'est établie à un "maigre" 2,3% : un chiffre qui constitue la sixième place dans l'UE mais qui n'est pas suffisant pour un pays en développement. Pour 2012 les estimations sont plus basses et devraient s'établir à 1,5%. En outre, le revenu par habitant est l'avant-dernier le plus bas de l'Union, devant seulement la Bulgarie avec environ 6 XNUMX euros par an : un indice de bas salaires (ainsi qu'une fiscalité favorable) qui servent à attirer les investissements mais qui révèlent aussi le net écart qui existe encore entre Bucarest et Bruxelles.

Les difficultés qui ont pris naissance dans la zone euro se font également sentir en Roumanie, comme en témoignent les protestations sociales qui ont eu lieu notamment dans la capitale Bucarest au cours de l'hiver dernier. Pour faire face à la situation économique difficile, l'exécutif du président Traian Basescu (au pouvoir depuis 2004) et du Premier ministre Emil Boc a dû procéder à une série de mesures d'austérité, y compris un augmentations d'impôts et réductions des salaires et autres avantages pour les travailleurs du secteur public, qui se sont accompagnés d'une série de prêts d'ajustement reçus du Fonds monétaire international pour un total de 27 milliards d'euros (la dernière tranche récente s'élève à 5 milliards). Les manifestations ont conduit le gouvernement du Parti libéral démocrate (centre-droit) à démissionner ; de nouvelles élections présidentielles auront lieu en novembre avec des sondages montrant la coalition de centre-gauche en tête.

Cependant, en cette période de discipline budgétaire rigide (Bucarest a adhéré, comme presque tous les membres de l'UE, au "Pacte budgétaire") et de stagnation, il sera difficile pour une nouvelle structure gouvernementale de pouvoir inverser rapidement la tendance. Bien sûr, La Roumanie a toujours l'arme de la dévaluation tenter de redonner de l'oxygène à son économie en jouant sur la compétitivité-coûts ; mais dans un pays où les salaires sont déjà très bas et dans une période où la demande dans le reste de l'Europe a diminué, une telle mesure risque de ne pas avoir les effets escomptés. Par ailleurs, beaucoup reste à faire en termes de lutte contre la corruption et de sécurité juridique : malgré l'adhésion à l'UE, les progrès restent limités sur ces fronts, comme l'indique le soixante-quinzième place dans l'indice de perception de la corruption développé par Transparency International.

Cela dit, ce qui était autrefois la région européenne la plus orientale de l'Empire romain se confirme comme une destination intéressante pour les investissements étrangers de nos entreprises. En particulier, les entreprises les plus intéressées sont celles opérant dans des secteurs à forte intensité de main-d'œuvre, en raison de la disponibilité de main-d'œuvre à faible coût, tels que l'assemblage et les composants, mais même les grands groupes d'infrastructure qui trouvent ici un terrain fertile grâce au financement apporté par les fonds de l'UE. Deux exemples avant tout : Ansaldo Breda attend le dénouement d'un contrat de 1,5 milliard d'euros pour le doublement de la centrale nucléaire de Cernavoda, tandis que Astaldi a récemment remporté un contrat de 60 millionsi pour la construction d'un tronçon de l'autoroute Bucarest-Constanta (financé, regardez, à 85% par le Fonds de Cohésion).

En ce qui concerne le secteur bancaire, la Roumanie connaît une moment de difficulté depuis 16% des actifs émis par les établissements de crédit nationaux sont entre les mains d'épargnants grecs. L'Italie est présente dans ce secteur avec de grands groupes tels que UniCredit, qui à travers Tiriac Bank est présent dans plus de deux cents agences, et Intesa San Paolo, qui compte un peu moins d'une centaine d'agences pour un total de bilan d'environ 1,2 milliard d'euros.

Quel avenir, alors, pour la Roumanie ? Les vulnérabilités structurelles de ce pays, liées à une économie encore peu développée et à des déficiences "systémiques" dues à des problèmes de respect de la loi et à une corruption généralisée, font que la nation balkanique sera vouée à souffrir plus que d'autres à l'Est Europe la crise de la zone euro. Une reprise de l'économie en Occident constituerait en tout cas certainement un "carburant" fort pour la croissance roumaine, qui a pu faire de véritables pas de géant ces dernières années. L'Italie, deuxième partenaire commercial, doit continuer à porter un regard favorable sur ce marché tant en termes de nouveaux investissements que de capacité d'exportation, même si cette dernière est fragilisée par la baisse des salaires qui affaiblit la consommation intérieure. Le ciel au-dessus de Bucarest est donc bleu mais aussi plein de nuages.

Passez en revue