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Micossi : l'accord européen, un pas décisif pour sauver la Grèce et surtout l'euro

Après nous avoir amenés au bord du gouffre, les dirigeants de l'Eurogroupe ont trouvé l'aile pour parvenir à un accord pour sauver la Grèce et surtout l'euro - L'importance des obligations de l'Union et les leçons à en tirer

LES DIRIGEANTS EUROPÉENS SAUVENT LA GRÈCE. ET AUSSI L'EURO

Après nous avoir amenés au bord d'une contagion destructrice se propageant à l'Espagne et à l'Italie, les dirigeants de l'Eurogroupe ont enfin décidé ce qu'il fallait faire non seulement pour sauver l'euro, mais pour rendre la dette souveraine soutenable grâce à un plan de croissance. Et des leçons peuvent être tirées de l'histoire des mécanismes de gestion de crise. Le plus important est que la reconstruction de la crédibilité du gouvernement de la zone euro nécessite un comportement cohérent et doit avancer sans arrière-pensée sur la voie choisie.

LE FORFAIT GREC

En résumé, pour la dette grecque il a été décidé :

 – D'accorder un nouveau prêt à la Grèce de 109 milliards d'euros, d'une durée comprise entre 15 et 30 ans et à des taux d'intérêt d'environ 3,5 %, avec un différé d'amortissement de 10 ans, ainsi que d'allonger "de manière significative" les échéances des prêts existants prêt;

– Utiliser le Fonds européen de stabilité financière (FESF) pour le financement et la gestion de crise, qui sera financé par l'émission d'euro-obligations (de l'Union ?) sur les marchés internationaux ;

– Que le FESF pourra intervenir sur le marché secondaire des obligations souveraines des pays membres de l'euro pour des opérations d'achat et d'échange de titres (debt swaps) aux prix du marché, ainsi que pour financer des opérations de rachat, dans la limite de 12,6 milliards d'euros) de leur dette publique par les pays en difficulté ;

– Que le secteur privé devra contribuer à hauteur de 37 milliards au refinancement de la Grèce, sous des formes encore à définir qui, selon des indications non encore officielles, comprendront des réinvestissements sur la maturité de la dette (debt rollover) à maturités longues et d'autres formes de swaps de titres avec décotes (réduction de capital); il est donc admis qu'il y aura un défaut sélectif, c'est-à-dire une restructuration de la dette grecque, que nous essaierons de limiter le plus possible dans le temps ; trente grandes institutions financières, sous l'égide de l'Institute of International Finance, se sont déjà engagées à y participer ;

– Que le FESF pourrait étendre son financement aux besoins de recapitalisation des banques (y compris dans d'autres pays de la zone euro) affectées par des pertes, ainsi qu'aux opérations de rehaussement de crédit, vraisemblablement sous forme de garanties ou d'offres de collatéral (jusqu'à 35 milliards d'euros), dont une partie significative pour couvrir les risques de la BCE dans ses opérations de soutien à la Grèce.

Les mêmes conditions de financement et de soutien seront étendues à l'Irlande et au Portugal, mais sans possibilité de restructuration de la dette. En effet, dans le même temps, la "détermination inflexible" de tous les autres pays de la zone euro à honorer intégralement leurs dettes publiques a été annoncée (paragraphe 7 du communiqué du Conseil).

Un fort programme de soutien à la croissance en Grèce est également annoncé à travers la mobilisation de fonds et une task force spéciale d'assistance technique aux réformes structurelles : enfin, la croissance est reconnue comme faisant partie intégrante de tout programme de retour à la solvabilité.

LES QUATRE LEÇONS DE LA CRISE

Quelles leçons peut-on en tirer ? La première leçon est que ceux qui croyaient que la dette grecque était insoutenable et donc qu'une restructuration de la dette était nécessaire avaient raison. La restructuration satisfait également la demande allemande de participation du secteur privé. Cependant, il fallait un filet de sécurité, capable de libérer la BCE des tâches de soutien non monétaire aux pays de l'euro et d'amortir le choc de la restructuration, qui lui est désormais proposée via le FESF et ses émissions obligataires de l'Union. C'est l'absence de filet de sécurité qui a transformé la crise d'un tout petit pays de la zone euro en crise de la zone euro. L'Allemagne n'a pas voulu le comprendre, elle l'a finalement accepté au bord du précipice ; aussitôt les marchés ont bondi, le vent de contagion semble s'être dissipé. Même les partisans inconditionnels des thèses allemandes aventureuses, qui ont également fait la une des journaux italiens faisant autorité, devront changer d'avis.

Ceci introduit la deuxième leçon, qui concerne la conception institutionnelle des mécanismes de gestion de crise dans la zone euro. Le refus allemand d'utiliser le FESF et les obligations de l'Union a eu le curieux effet de transformer potentiellement toute opération de soutien financier dans la zone euro en dette publique au prorata des pays créanciers : avec le double effet que l'opinion publique des pays créanciers a cru qu'il était devant supporter directement les dettes des débiteurs insolvables, tandis que l'extension des difficultés réduisait progressivement le nombre des créanciers. Le cauchemar d'une union de transfert a privé de sommeil les contribuables allemands et finlandais et détruit la crédibilité des programmes d'aide, car il était évident qu'éventuellement, inévitablement, les créanciers débrancheraient la prise.

Mais, maintenant que les opérations de soutien financier sont redevenues telles et ne sont plus des transferts fiscaux, il faut aussi en tirer les conséquences pour les mécanismes de décision du FESF et du futur Mécanisme européen de stabilité (MES) : s'il convient de laisser aux ministres des finances de la zone euro l'appréciation unanime des conditions de menace sur l'euro justifiant la mise en place d'un programme de soutien, les décisions opérationnelles ultérieures sur les formes de soutien et les interventions sur le marché devraient être confiées à l'exécutif , le Conseil d'administration , lui laissant décider à la majorité. Ce n'est qu'ainsi que les décisions opérationnelles individuelles pourront être soustraites à la discussion sur la place publique des pays créanciers : ce qui peut à nouveau détruire la crédibilité des interventions.

Enfin, la réaction positive des marchés financiers confirme que nous sommes sur la bonne voie. Mais, et c'est la dernière et la plus importante leçon, la mise en œuvre des décisions importantes d'hier au sein du Conseil suprême de la zone euro ne doit pas nous ramener au climat de division et de confusion qui nous a fait craindre, ces derniers jours, la fin de l'« EUR. La reconstruction de la crédibilité du gouvernement de la zone euro nécessite un comportement cohérent dans la voie choisie, elle doit se poursuivre sans arrière-pensée. La mesure du succès ou de l'échec sera évidente dans la capacité à ramener les écarts sur les obligations d'État à des dimensions normales.

Intervention tirée du site LaVoce.info

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