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Le destin de l'Italie : poursuite des réformes ou déclin inéluctable ?

Sans réformes, l'Italie n'a pas d'avenir mais les réformes doivent effectivement être menées et pas seulement prêchées car sinon les peurs et les résistances sont attisées - En réalité, l'Italie, avec une grande partie de la vieille Europe, en a absolument besoin pour revenir à une croissance minimale, en moyenne entre 1 et 1,5 %, même si les atteindre n'est certainement pas facile.

Le destin de l'Italie : poursuite des réformes ou déclin inéluctable ?

La lecture, quoique en grands blocs plutôt que dans une séquence ordonnée, du beau volume édité par Luca Paolazzi et Mauro Sylos Labini ("L'Italie à la croisée des chemins. Réforme ou déclin : la leçon des pays qui réussissent". Luiss University Press) m'a fait il offre le droit de revenir sur une de mes déclarations qui, il y a quelques années, a au moins fait dresser l'oreille et peut-être même les cheveux de mon auditoire à quelqu'un. A propos de l'appel constant aux réformes, je me suis exclamé : Assez de ces reformites ! L'un des organisateurs de la conférence a été tellement impressionné par ma déclaration et par les quelques considérations avec lesquelles j'ai essayé de la justifier qu'il m'a invité à écrire un livre sur le sujet ! Comme j'ai écrit très peu de livres et toujours avec la collaboration de collègues ou de journalistes, j'ai été heureux de décliner l'invitation, également répétée par lettre, de la manière imposée par la courtoisie. En vérité, j'étais aussi effrayé par la clarté de mon affirmation qui, dans le feu de la discussion, était allée bien au-delà de mon vrai sentiment.

En fait, je n'étais pas et je ne suis pas contre les réformes, mais je suis hostile à la prédication constante et obsessionnelle de celles-ci, à leur invocation comme solution thaumaturgique à tous nos problèmes. Tous ceux qui ont étudié sérieusement les processus de réforme là où ils ont été mis en œuvre, dans les pays émergents et développés, ont constaté qu'ils ex post un la fatigue des réformes pour les coûts non seulement économiques et sociaux mais aussi psychologiques qui en résultent. Cependant, il y a aussi un réformer la peur qui se manifeste ex ante lorsque le spectre de la ou des réforme(s) commence à se matérialiser et devient l'objet de débats, souvent acrimonieux, dans les médias et de tourments individuels solitaires.

Le prêche constant des réformes, loin de favoriser leur mise en œuvre, accroît et étend le réformer la peur qui s'empare de tous ceux qui ont quelque chose à perdre aux réformes ; plus les réformes promises, brandies ou menacées sont incisives, larges et nombreuses, plus large est l'audience de ceux qui leur résistent et s'y opposent psychologiquement. Faut-il en conclure que personne ne veut de réformes ? Pas du tout. Ils sont désirés, demandés, exigés par ceux qui n'en sont pas affectés ou même espèrent en tirer un avantage ; c'est-à-dire qu'elles doivent concerner les autres, pas nous. Souvent, pour les « vendre » sur le marché politique, on prône des réformes qui ne coûtent pas d'argent ; même lorsqu'ils sont gratuits pour le trésor public, ce qui arrive rarement, ils coûtent à l'individu et aux groupes concernés sinon en portefeuille, du moins en habitudes. Là réformer la peur il est nourri…

Les plus soucieux de notre avenir en tant que nation soulignent que les réformes dont nous avons le plus besoin sont des réformes structurelles, celles capables de changer les paramètres fondamentaux de l'économie et de la société, de restaurer la productivité et la compétitivité de notre appareil productif, de rétablir une meilleur équilibre entre les raisons de solidarité entre les hommes et celles de liberté humaine. Dès qu'on s'éloigne des formulations grandiloquentes, on se rend compte qu'il est difficile de prédire comment les schémas concrets à mettre en œuvre se répercuteront sur les personnes concernées, combien de temps ils mettront pour produire des effets, si l'équilibre qu'ils généreront sera tolérable stable ou nécessitera d'autres réformes ou au moins divers ajustements… réformer la peur augmente encore…

Une attitude schizophrénique est alors déterminée : on parle constamment et dans des contextes variés de réformes structurelles, mais concrètement on se hâte de monter des commissions, d'organiser des conférences, de tonner dans des débats, de participer à des parler montrer télévision et divers dehors sur le réseau. Ainsi le danger est exorcisé et on arrive souvent à la conclusion que les coûts sont élevés, les bénéfices incertains, les temps pas mûrs, il est donc bon de différer leur mise en œuvre…

Une dernière réflexion sur réformer la peur. Au début du XXe siècle, les réformes étaient la fixation des socialistes et des populaires qui, bien que de perspectives politico-idéologiques différentes, avaient des préoccupations et des objectifs de nature sociale, tandis que la bonne administration et la libération de l'économie de la présence de l'État étaient les buts auxquels la droite aspirait. Aujourd'hui, les réformes sont devenues le mantra de tout le monde, à droite comme à gauche, si bien que le réformer la peur elle ne s'évanouit pas avec l'alternance des majorités et des gouvernements, en effet la rengaine réformiste se poursuit avec révisions, réexamens et ajournements…

2. À travers des dessins et des factures, pas facile à comprendre pour le qui est populaire, des réformes (souvent incomplètes) sont votées au Parlement italien, mais parfois les effets de certaines législatures diffèrent… ; Ainsi, le réformer la peur s'estompe et laisse place au sentiment autosatisfaisant que le devoir de réforme a été rempli, qu'une loi a été votée, fut-elle retardée dans son application père mort ou votée sans couverture administrative, sans parler de la loi budgétaire de généralement limité à un ou deux exercices. Dès que les faits économiques, les organisations sociales, les instances internationales qui nous surveillent sans cesse et les fanatiques habituels rouvrent le dossier des réformes structurelles il y a des cris du genre : « Nous avons déjà donné, maintenant c'est au tour des autres ! Au lieu de cela, il leur incombe toujours soit parce qu'ils sont les plus faibles qui paient toujours, soit parce qu'ils sont les plus intelligents qui continuent à se soustraire aux obligations ou à reporter les engagements à long terme, plutôt que de les honorer hic et jamais.

Les Italiens, comme nous le savons, ont été façonnés par la Contre-Réforme, non par la Réforme protestante ; donc pour eux l'orthodoxie et la conservation sont primordiales. A tel point que dès qu'une réforme est lancée, ses défauts sont recherchés et trouvés avant tout en termes d'équité. Donc, pour réaliser son propre idéal de justice dans la disposition de quo agiter tout et même plus est fait pour contre-réformer ou du moins pour rendre la réforme initiale moins logique, plus sensible à ses propres intérêts, finalement plus difficile à justifier et à gérer. Le Gouvernement qui sortira des élections des 24-25 février 2012 – s'il en émerge un… – sera surtout occupé à refaire ce qu'a fait le Gouvernement Monti ; Pour quelle raison? Pour la simple raison que « l'étrange majorité » a vite oublié les votes de confiance accordés sur les différentes mesures et promis lors de la campagne électorale abrogations, remboursements et baisses de taux d'imposition, ainsi que des amnisties de tombes et amnisties de construction. Même Sen. Monti s'est livré à certaines promesses d'allégements fiscaux pendant la législature. Tous inconscients des conditions des finances publiques, de la faible croissance potentielle du PIB et du froncement de sourcils fier de l'Union européenne ? Il semblerait que oui, afin de respecter le scénario de la contre-réforme…

Alors est-il vrai que gouverner les Italiens n'est pas difficile mais inutile ? Peut-être oui, mais pour la raison inverse de celle communément admise : ce sont les gouvernants qui font tout pour que les Italiens, chatouillés dans leur propre égoïsme, s'enferment dans la défense hérisson de leurs positions respectives et du « particulier ». A mon avis, la population ne peut pas être maintenue pendant des décennies dans le cauchemar des réformes structurelles, que toute la classe intellectuelle des politologues, économistes et sociologues, souvent avec une grande condescendance, concocte et recommande depuis les forums les plus divers. Les réformes, notamment structurelles, doivent être décidées et mises en œuvre rapidement. Ils ne peuvent pas non plus être atteints tous ensemble, pour des raisons allant de la capacité administrative à les gérer à celle de la population qui est concernée et qui doit adapter son comportement. Il est souhaitable que les réformes qui affectent les intérêts de plusieurs groupes soient choisies, afin d'éviter les critiques de discrimination à l'encontre d'un seul ; en même temps, cependant, si les intérêts en jeu sont substantiels, il faut éviter que leurs porteurs ne s'unissent et ne rendent encore plus difficile le chemin de la réforme. Cependant, sauf en cas d'erreurs grossières, il faut attendre au moins les premiers résultats des changements introduits avant de songer à réformer les réformes !

Nous pouvons nous demander : quel est le meilleur moment pour entamer une saison de réformes structurelles ? Après un choc. Voyez l'Allemagne avec l'unification après la chute de la RDA, la Pologne avec l'effondrement du régime communiste, le Chili avec la fin de la dictature de Pinochet. Avec la libération de 1945, l'Italie a largement éliminé la superstructure corporative et autarcique, a embrassé la libéralisation du commerce international, reconstruit le pays et transformé son économie agricole en économie industrielle. Par la suite, elle n'a connu que des cycles d'inflation et de balance des paiements, dont elle est sortie avec des resserrements du crédit et des dévaluations ou dépréciations des taux de change jusqu'à l'adoption de l'euro. Un autre choc aurait pu être le terrorisme avec ses années d'avance, mais il a fonctionné dans l'autre sens, c'est-à-dire qu'il a conduit à aggraver les déséquilibres existants dans les finances publiques pour maintenir les syndicats et les travailleurs de ce côté de la clôture grâce aux dépenses publiques. L'entrée dans la zone euro aurait pu être un choc pour rendre notre économie compétitive sans manipuler le taux de change, mais cela ne s'est pas produit. Au contraire, la croyance s'est développée que la monnaie unique confère une garantie collective à notre dette publique (en plus de la dette grecque, portugaise, etc.), à tel point qu'elle est échangée ou émise dans des conditions non substantiellement différentes de celles de l'Allemagne « vertueuse ». De là est née la conviction que ce qui avait été fait implicitement et à tort par les marchés pouvait être volontairement reproduit par la communautarisation, en tout ou en partie, des dettes souveraines de la zone euro à travers le Eurobond.

3. Il ne fait aucun doute que l'Italie est dans une situation de forte stagnation depuis quinze ans, que la productivité du travail et la productivité totale des facteurs sont insatisfaisantes ou négatives est indiscutable, que le chômage, en particulier le chômage des jeunes, atteint des niveaux alarmants, bien qu'inférieurs aux Les espagnols, c'est indéniable. Tout le monde invoque la croissance, mais celle-ci ne se matérialise pas, comme la pluie, simplement parce qu'elle est invoquée. Le remède recommandé une fois de plus est la réforme. Deux économistes du Fonds monétaire international écrivent dans les conclusions de leurs travaux : « L'Italie a besoin de réformes profondes (complet services publics locaux, barrières à l'entrée, investissement dans les infrastructures productives. Évidemment, pour le travail, l'accent est mis sur une plus grande flexibilité, sur la négociation au niveau de l'entreprise, sur la préférence pour une augmentation de l'emploi par rapport à celle des salaires, des politiques actives sur le marché du travail, en particulier pour les femmes ; pour la fiscalité, il est recommandé de déplacer la charge du travail et des affaires vers la consommation. Manque-t-il quelque chose à cette liste impitoyable ? Peut-être oui, l'amélioration du capital humain qui, sauf oublis de ma part, n'a pas grande importance, même si l'on évoque nos modestes performant dans l'enquête PISA Selon les simulations de Lusinyan et Muir, les réformes actuellement en cours en Italie pourraient potentiellement augmenter le PIB réel de 53/4% dans les cinq prochaines années et de 101/2% à long terme. Même en prenant ces exercices avec la plus grande prudence, on ne peut nier qu'au vu du tour électoral non concluant des 24-25 février, si l'on revient sur ce qui a été fait, les avantages en termes de PIB montrés par les simulations resteront sur le papier, pas à l'histoire...

L'Italie, ainsi qu'une grande partie de la vieille Europe, doit retrouver une croissance minimale – disons en moyenne entre 1 et 1,5 % – si elle ne veut pas reculer trop vite dans le concert des nations. Cependant, nous pouvons revoir, comme nous l'avons fait il y a quelques décennies, la croissance comme un deus ex machina qui résout toutes les tragédies d'Euripide ?

La réponse pourrait être négative si l'on suit Robert Gordon, selon qui la croissance des 250 dernières années pourrait être un épisode unique dans l'histoire de l'humanité, puisque dans cette longue période elle a été la conséquence de trois révolutions industrielles : la première a tiré le des chaudières à vapeur, de la filature de coton et des chemins de fer ; la seconde était alimentée par l'électricité, un moteur à combustion interne et l'eau courante dans la maison ; le troisième s'est appuyé sur les ordinateurs et Internet, mais avec un impact sur la productivité qui s'est considérablement affaibli au cours des huit dernières années. La croissance de la production par habitant aux États-Unis, il ralentit depuis le milieu du siècle dernier et, en raison de la baisse de la productivité, il continuera de ralentir. Pour les deux premières révolutions, les effets ont duré au moins 100 ans. Le troisième ne semble pas avoir la même capacité propulsive et, de plus, six vents contraires soufflent sur l'économie américaine, mais aussi sur d'autres pays développés comme le nôtre : a) la fin du dividende démographique ; b) une inégalité croissante ; c) l'égalisation des prix des facteurs, du fait de la mondialisation et d'Internet ; d) les problèmes d'éducation résultant de l'augmentation des coûts de l'enseignement universitaire et de la faible performance des élèves du secondaire ; e) réglementation pour la protection de l'environnement et fiscalité ; f) surendettement des consommateurs et de l'État.

Contrairement à Gordon, Krugman n'est pas pessimiste quant au potentiel de croissance qui pourrait être déclenché, par exemple, par l'intelligence artificielle, mais il est préoccupé par les effets distributifs qu'elle pourrait générer. Peut-on supposer que les deux positions concernant le potentiel de la troisième révolution industrielle pour alimenter la croissance tendent à s'équilibrer ? Certainement oui, jusqu'à ce que le chapitre énergétique soit pris en considération… Selon Tim Morgan,

la mondialisation qui a séparé les lieux de production de ceux de consommation, la difficulté d'obtenir des données fiables pour interpréter la réalité et la dynamique de l'énergie préparent la tempête parfaite et mettent un terme à la croissance. Il n'y a pas grand-chose à ajouter sur la finance, considérant qu'elle est à l'origine de la Grande Récession qui se prolonge dans le temps au-delà de toute prévision négative initiale. On ne peut pas non plus se plonger dans la complexité de la mondialisation ou l'inadéquation informative permanente des données collectées. Sur l'énergie, cependant, il faut dire que l'EROEI, c'est-à-dire l'énergie obtenue par rapport à celle utilisée, qui initialement en Arabie saoudite était dans un rapport supérieur à 100 pour 1, aujourd'hui pour la plupart huile de schiste et gaz (hydrocarbures de schiste) est de 5 pour 1 et pour le sables bitumineux (sables bitumineux) par 3 pour 1. Les États-Unis tentent de retrouver leur indépendance énergétique en forant horizontalement du gaz de schiste. Cela pose non seulement des problèmes environnementaux mais aussi économiques ; on calcule que si les Américains dépendaient entièrement du de schiste pour les hydrocarbures, les coûts énergétiques seraient égaux à 16,7% du PIB, contre 2,4% en 1990 (EROEI estimé à 40:1). Le prix de l'énergie, qui nous a donné deux chocs dans les années 70, réserve-t-il d'autres mauvaises surprises pour la croissance et le bien-être ? Les doigts restent croisés !

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