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Grèce et au-delà, il est temps que l'Italie rejoigne le directoire franco-allemand

Il ne suffit pas de participer uniquement aux tables institutionnelles européennes pour influencer les décisions sur la Grèce et sur d'autres dossiers cruciaux comme l'immigration : il est temps pour l'Italie d'essayer d'entrer dans l'annuaire franco-allemand pour compter davantage - Participer à l'annuaire sert à construire des relations solides avec d'autres partenaires basées sur la confiance et les concessions mutuelles

Grèce et au-delà, il est temps que l'Italie rejoigne le directoire franco-allemand

"C'est aux politiques de trouver une solution" ne cesse de répéter Alexis Tsipras ces deux dernières semaines, certainement les plus compliquées depuis qu'il est à la tête du gouvernement grec. Et effectivement, il a raison. La négociation est désormais entre les mains des politiciens européens. Pas tous de la même manière cependant. L'Allemagne et la France ont pris le leadership, Angela Merkel et François Hollande discutant directement avec le Premier ministre grec, formant une « direction » dont, peut-être, l'Italie aurait intérêt à se joindre.

La situation en Grèce empire de jour en jour. Les timides signes de reprise que l'on pouvait entrevoir fin 2014 ont disparu. Depuis janvier, les prévisions de croissance pour 2015 ont été revues à la baisse de 2,5 points de pourcentage (de 0,5% à 4%), celles de l'excédent primaire de plus de 4,8 points (de 0,4% à 25%), le chômage de d'un demi-point de pourcentage (de 25,5 % à XNUMX %) et les dépôts bancaires sont à des niveaux historiquement bas.

Dans un tel scénario, le gouvernement d'Alexis Tspras devrait se mettre à l'abri et chercher un accord au plus vite. Aussi parce que, désormais, il ne reste plus beaucoup de temps : d'ici le 30 juin, un milliard et demi d'euros devra être remboursé au Fonds monétaire international.

Au lieu de cela, les négociations sont au point mort. Athènes a refusé toutes les propositions du Groupe de Bruxelles (le nouveau nom de la Troïka souhaité par la Grèce) : la révision des taux de TVA (malgré la jungle injustifiée des facilitations-exonérations), la réforme du travail (malgré le salaire minimum proposé, 751 euros, légèrement inférieur à celui allemand) , la réforme des retraites (malgré le fait que les dépenses de retraite grecques, 16 % du total, sont parmi les plus élevées des pays avancés) et, surtout, un excédent primaire de 1 % en 2015 et de 2 % en 2016. Le peuple grec ne peut plus supporter les sacrifices et les humiliations », a déclaré le Premier ministre grec.

Sur ces bases, un accord apparaît de plus en plus difficile, voire impossible. Pourtant, 71% des Grecs seraient favorables à un compromis afin d'éviter le risque d'un éventuel défaut, et surtout, de mettre fin à l'incertitude (Grexit si, Grexit non) qui plonge le pays dans une crise bien pire que celle des six dernières années. Tsipras en est conscient, mais doit faire face à la résistance de l'aile la plus radicale de son parti, décidée à tenir les promesses faites pendant la campagne électorale : en somme, une manœuvre expansionniste à hauteur de 11 milliards d'euros, soit près de 7 % du PIB. (comme si l'Italie dépensait 120 milliards d'euros).

Ainsi, face à l'impasse technique, Tsipras a décidé d'inscrire les négociations sur un plan purement politique, en choisissant comme interlocuteur l'ennemie jurée de son pays, Angela Merkel.

Selon Athènes, la chancelière est la seule à pouvoir trouver une solution politique. Elle en a les capacités, mais surtout les incitations puisque l'Allemagne revendique des crédits de 60 milliards d'euros auprès de l'Etat grec. Et puis, le défaut grec mettrait en péril l'avenir de l'union monétaire, et donc de l'euro, un scénario que Merkel veut absolument éviter.

La chancelière se garde toutefois de mener seule les négociations. Il veut le soutien de la France, au nom de cet axe franco-allemand qui a géré la crise grecque dès les premières heures (à l'époque le partenariat avec Nicolas Sarkozy était surnommé le Merkozy). La dernière d'une série de rencontres entre le dirigeant allemand, le président français Hollande et le lauréat grec Tsipras a eu lieu la semaine dernière en marge du sommet entre les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne et ceux d'Amérique latine.

Jusqu'à présent, l'Italie a participé de manière discontinue à ce type de réunion. Par exemple, en 2011, elle faisait partie d'un groupe restreint de pays qui ont discuté, notamment avec des contreparties privées, de la restructuration de la dette grecque. Ces derniers jours, Matteo Renzi a indiqué vouloir "participer uniquement aux tables institutionnelles", c'est-à-dire uniquement celles qui regroupent l'ensemble des 19 pays de l'union monétaire. Une position compréhensible d'un point de vue formel mais qui risque, à terme, de saper la capacité de négociation de notre pays.

Dans une union à 19, il est physiologique - sinon souhaitable - que soit créé un directoire auquel participent les plus grands États, appelés à exercer des fonctions de direction. L'Italie, le troisième plus grand pays, pourrait s'asseoir à ces "tables non institutionnelles". Et pas seulement pour discuter de la Grèce (le montant des crédits italiens à la Grèce, soit dit en passant, est très similaire à celui de la France, respectivement 40 et 46 milliards d'euros). Mais aussi pour profiter de ces opportunités pour discuter de manière informelle d'autres sujets. Comme l'immigration, par exemple, sur laquelle on se heurte à la France.

Faire partie d'une direction peut justement servir à nouer des relations durables, fondées – même en Europe – sur la confiance et les concessions mutuelles. Dans le passé, en raison de la trop courte durée de ses gouvernements, l'Italie n'a jamais réussi à faire partie de cette direction ; il suffit de penser qu'Angela Merkel, depuis qu'elle est à la tête de l'Allemagne, a dû faire face à pas moins de cinq premiers ministres italiens différents. Il est peut-être temps de changer.

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